BESTIAIRE MINERAL ...
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Ce jour-là quand la mer me prenait - on ne la prend jamais - je parcourais 40 Nautiques entre 10h et 16 h par un vent d'ouest de Force 6/7 Moyen entre la Testa et Fenu di Bunifaziu. Sur une Naish 8.5 , avec une 4.7 m2 dans les mains, en croisant loin des côtes, je découvrais encore une fois le Large et les profondeurs mouvantes sous un Ciel cyan et sur la mer safre. Des heures durant, avec nos solitudes d'oiseau marin, nous dévalions la mer du vent et de grandes ondes bleutées. Je naviguais avec deux îles, tout près de leur étrave, j'oubliais tout, jusqu'à ce petit esquif véloce qui me portait. Je n 'avais d'yeux que pour le grand théâtre de l'antique Nature .
L'écologie serait-elle une invention des hommes après que ces derniers aient blessée à mort la vie éternelle ?
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Les deux clichés sont de Marco B .et de Vdk...
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Quand la mer se réchauffe en été et que le soleil au zénith darde ses rayons sur l 'ocre embrasé des rochers, comme il est plaisant de longer le Littoral Insulaire d'une Île étrange, par vent d'Ouest, en de grands bords abattus, de béer de longs moments aux étreintes de l 'eau, et vaguer , émerveillable à souhait!!!
J'ai choisi deux Tableaux pour illustrer cet Article, afin d'ouvrir grands les yeux devant une saison vêtue de bleus que le printemps pluvieux a tant nourrie, délicieusement apprêtée ...
Les Oiseaux de mer aiment à se percher sur ces monolithes de granit et attendent leur moment, fiers, assurés. Ils s'enivrent de liberté, d'espaces avant l 'envol décisif au -dessus des vagues et des brisants. Les tempêtes ont dessiné le rivage, élevant la roche nue comme des dunes de pierres. La végétation, avec humilité, se sent protégée par le rempart naturel, puis, confiante, elle déploie avec opulence et opacité ses plus belles ramures de Genévrier, de Lentisques, d'Arbousiers, de Myrte, d'oliviers sauvages entremêlés.
Le Ponant est soutenu, assombrit dans les rafales le bleu de la mer, étire au loin un flot houleux, lisse . Chaque petit cap s'égaie, mélodieux ainsi que tous les secs qui affleurent, élèvent de sublimes cristaux d'émeraude en sculptures éphémères de verre .
Le cap et son amer me guident du large. L' océan de verdure trace les limites d'un autre monde. Il ondoie comme les blés au vent et tous les arbustes qui ploient, agitent leurs bras, semblent saluer mes incessants retours à la côte .Sous le vent d'un tombant audacieux, abrupt, la mer s'abrite, respire amplement, languissante, étale. Au -dessus des hauts fonds, l 'écume dissout lentement le souvenir d'un ballet de vagues passées et dessine sur l 'eau qui pétille, encore frémissante, un atoll de jade, l'espérance des Îles ...
C'est là que je retrouve l 'ultime solitude, avec quelques oiseaux - peut-être, qui me connaissent et me rejoignent à chaque sortie - Je vogue, je navigue et je file sur la mer, dans le ciel, à travers le maquis; sous mes pieds exaltés, à l 'étrave de la petite planche que je mène, l' eau s'enfuit et mon sillage devient le plain-chant de l 'eau, du vent, des oiseaux qui planent à l 'aplomb de mon gréement .
Et si la mer est plate dans les golfes, dans les baies et les anses, c'est vers les grands fonds, les courants et les dalles rocheuses qui remontent qu 'il faut composer avec vigilance.
Je sais maintenant où croiser, la route est longue mais l 'accueil subjuguant de beautés ... Les falaises de craies noyées de blancheurs dressent d'impossibles verticales brumeuses à l 'assaut du détroit. La Terre a cédé, la mer s'ouvre, elle est partout d'un bleu cobalt sous un ciel de Juillet illuminé d'étoiles de mer ... Et si les oiseaux voyageurs vivaient le jour le ciel et la voie lactée de leurs nuits en survolant la Grande Bleue!
Tout autour d'un cercle magique, la mousse épaisse nimbe la mosaïque sous-marine, les lames rivalisent d'éclats, s'enroulent puis se dressent, rebondissantes, vibrants échos des blocs cyclopéens de porphyre; elles ne se couchent jamais et au bout de nos transes je me laisse charmer comme le cobra envoûté par le vieux Bédouin dans les sables de Tamerza*, je plonge, sans me soucier du temps que les vagues égrènent, dans un rêve saphir, entre l 'or du reg et l 'infiniment bleu...
* Tamerza : petit Oasis du Grand-Sud Tunisien, dans les Massifs de Matmata .
MARIN56