HOMMAGE AUX BÂTISSEURS ET AUX GARDIENS DE PHARES
Gardien d'un phare en Occident,
Au feu tournant de la lumière,
Mon rêve est baigné par la mer,
Mon cœur dessillé par le vent
Théophile Briant
(poète breton)
Sédentaires des grands déserts salés que sillonnent leurs frères nomades les marins, navigateurs immobiles dont le vaisseau est à jamais scellé
dans le roc à la frontière mouvante des continents,
les gardiens de phares sont les derniers représentants d'une race à part
René Gast
(journaliste spécialiste du voyage et du patrimoine)
Témoignage de Jean Pierre Abraham, Auteur et Poète, Gardien de Phare
Ils connaissaient les dangers de la mer et la douleur des foyers endeuillés. Ils incarnaient la lueur d'espoir au puits des nuits noires du labeur des marins livrés à la mer, aux pires tempêtes et à l'enfer des " flots abracadabrantesques " dépeints par Arthur Rimbaud.
Combien de sacrifices ont été consentis à l'édification titanesques de ces Phares, à la limite de la terre des hommes, au commencement des océans et des mers et du nouveau monde, pour que cesse l'injuste, l'inique naufrage et la dérive éternelle des trépassés !
Bâtis à la force des bras, là où le courage et l'homme s'effacent pour conduire la vie, ces vigies protectrices de l'aventure quotidienne des marins dominent les lames, fendent les courants du flux jusqu'au jusant que les coups de temps décuplent dans de terrifiants remous.
Certaines fois, à l'étale apaisée de basse ou de haute mer, ils surplombent tous les horizons des hommes, déclinant tant d'invitations au voyage, exauçant tant de vœux de retour vers toute la terre promise.
Dans l'ouragan, ils résistent et disparaissent submergés par les flots. Un instant, ils figent les vagues brisées en d'immenses voiles d'écume, élevant la plainte de l'eau à l'étrave du voilier. La mer se déchire sur l'ouvrage sans âge des hommes, semblant conjurer la mort depuis la nuit des temps.
Il est consternant d'assister petit à petit à l'automatisation des phares sur nos Côtes, au dépeuplement et à la déshumanisation de ces vestiges, gardiens et protecteurs de la mémoire des Marins disparus, de l'environnement.
Aujourd'hui, ils demeurent indispensables. Bien que dotés de tous les équipements modernes, la surveillance doit être plus exigeante et accrue ; elle ne peut se passer de la présence humaine et de l'expérience ancestrale des Gardiens de Phares à tous les niveaux de la Navigation.
La mer a plus que jamais besoin de l'homme pour être à son tour sauvée !
La mer, c'est l'âme, le souvenir et l'espoir d'une autre humanité...