SIGNES DE VENT
Ce jour-là, je me levai très tôt. Pendant la nuit, les rafales de vent avaient violemment secoué les arbres et nous ne pûmes dormir. C'était un vent chaud, humide, qui emplissait et fouillait l'obscurité, comme s'il voulait définitivement se libérer des touffeurs de l'été que la terre avait emmagasinées pendant de très longues semaines. A l'aube, le vent aussitôt se calma et l'air fraîchit lourdement, plus sec, plus vif. Le silence se fit tout autant assourdissant que la nuit avait été bruyante, ponctué de temps à autres d'un souffle léger et froid. Il pénétrait notre chambre, agitait docilement le faîte feuillu de la chênaie et de l'antique oliveraie, caressant les jalousies des vieilles fenêtres de notre maison. Les tendres ramures se balançaient, entre elles les oiseaux voletaient dans un bruissement d'ailes et de feuilles et jouaient à se cacher aux premières lueurs du soleil. L'horizon, impatient, embrasé, avant que le soleil ne fut levé, diffusait dans l'azur une divine lumière. Il me semblait que la nature renaissait au vent, reconnaissait ce qu'elle attendait fébrilement depuis si longtemps ; tout me parlait, je me hâtais, heureux, enfant insouciant d'un jour, happé par l'aube des magiciens.
Je me vêtis chaudement, pressentant aux nuances pourpres et rosées de l'azur, aux teintes orangées du ciel, des nuages inhabituels louant la fin de l'été, annonçant un vent automnal et frais.
En effet, sous le vent des massifs et dans le bleu auroral, au - dessus des sommets, une splendide sculpture lenticulaire, aux strates empilées et conquérantes, s'élevait, gagnait l'infiniment grand de la voûte céleste et que révélait, tardive, la dernière étoile du matin.
Le vent emportait des parfums de sapins, il exhalait aussi les senteurs de la mer proche tandis que vers l'orient se détachaient quelques fragments ouatés, les pensées vagabondes d'un Mistral lointain, surement très fort.
Ce jour-là, il nous combla des bleuités fluides de la mer et du ciel, et les nuages, comme des fruits mûrs et dorés, tombaient sur les plaines garnies d'éteule et de moutons blancs, contaient la valse des saisons languissantes
Lorsque les nuages se fragmentent et se déchirent, lançant en aval de petits bribes colorées, on dit qu'il se forme des " Bombes ". Le vent, en Amont est alors plus fort, il se renforce et nous arrive sans faillir. Ces petits nuages sont annonciateurs de coup de vent, de vrais messagers
!