TRAMONTANE
Solitaire ! mais que signent la rue,
Mille tours de portes closes
Un bain de foule au coeur du néant
Ces voies rapides et muettes
Déchirant l'innommable saison
Ces corridas bardées d'opprobres et de morts ?
Risque ou témérité, qu'importe !
La bordée hasardée vaut bien la déraison
Au loin, un soupçon d'étrange, de crainte
La certitude d'être déjà de l'autre côté du monde ...!
Des regrets, des remords ? oui, sûrement .
Amer, non ! Mais que la candeur du jour
Ne soit pas grevée du mensonge ...
J'opte vers le vaste océan
Pour ces reflets purs et d'argent
Le vol blanc des oiseaux
Aux chants des étoiles de mer
Plane comme l'ultime oraison,
Et fonde la nef ailée des vents
Une voûte aux justes croisées du Ciel
Et mes jours sont de bise et d'écume,
Au large je panse les mots déchus
Je dérive mais comme le flot
Jamais, je n'aurais viré de bord
Abandonné le quai sans adieu
Ni pourquoi ...?
J'ai si souvent froid, la scène est trop belle,
Silencieuse et farouche sûrement parfaite
Et ce théâtre qui me gagne, me prend et qui m'étreint
Aux seuils délaissés de l'azur,
Est-ce l'amour ?
Emporté par le vent,
Que vive alors le vent, le poème du temps !
Au fond des mondes et des cloaques
Liberté, rêve sont les ennemis à abattre
J'y laisserais un poids mais non mon âme
Les masses envient la fortune des valets
Et pourtant, vivre n'est qu'esprit
Qui ne se vend guère
Au fil de l'eau ...!
Océanique et Vague sera ma destinée,
Une ressouvenance en partance
Un sillage à jamais refermé
Sur la mer, regardez !
Le vol libre et joyeux du puffin
La migration comble toujours l'attente .
Je ne consomme pas l'étant ou l'avoir
L'antre prisée du paraître, l'éphémère
Je garde en secret un conflit de maux
Un songe de petits enfants ravis
Aux nuages blancs et gris qui voyagent,
Apaise en se cachant un abîme d'absences
J'irai jusqu'à l'épuisement étancher la soif
Large est le ciel du marin
Il y confie l'espoir et le chagrin
Mais à jamais ne trahit le grand bleu
L'aile s'ébat, si blanche et le vol dit vrai
Comme l'aura pulvérale et brassée du désert
Esquisse ses desseins de dunes
Je croise aux bords de la nuit
A bord du croissant de lune, je vogue.
Que vienne le chancre ou la folie
Entre vieillir ou partir, peut-on choisir ?
La mer ouvre la grille des prisons
Délivre toutes les tours d'ivoire
La mémoire rebelle s'y affranchit
Et que renaisse la rime .
S'éteindre ! hier, demain, après ; mais où ?
En terre ? Qui me priverait de l'éther et d'absinthe ?
J'habiterai ces lavis azurés, le flot chrysolithe
Que j'égrene comme la solitude,
Un chapelet de tendres lumières
Toutes les fois que je confie mon âme
Aux attentes de l'Au-Delà .
Un instant révélé, l'éternité révérée
Prendre le large ou toucher terre
Que m'importe les sens
C'est ainsi que le verbe balance
A l'infini ses parfums d'embrun
Quand l'essence divague sur les rives
Aux confins de l'oubli
Et jamais à demeure
2 ème Ecriture le 18.02.2012