EN MER, UN PUFFIN ...
" La Terre était si loin et vaines toutes les chances de l'abîme "
Je croisai au large l'hiver était si bleu
Loin des côtes qui creusait des sillons
Profonds et voluptueux
Les collines tombaient ocreuses
Roulaient leurs volutes de blocs
Inondée d’azur à la frange
Des nevés et des nuages
La Tramontane livrait sans répit
Une île aux clartés redoutées des frimas
Des éclats de terre voguaient lointainement
Sur la mer ondoyée du coup de vent
Alentour les brisants fumaient
Les flots iridescents séduisaient
La roche en leurs veines de béryl et de jaspe
Les ondes déferlaient subreptices
Secrètes et courant l'immensité
Les fonds écumaient généreusement
Au gré des vagues intumescentes
On n’oyait que le mugissement du vent
En ce choeur ouaté et d'albâtre
Le vaste dédale humait l’embrun
La scène et les actes envoûtants
D’une partition océane infinie
Consacraient leur vastité
Un univers euphonique et de solitude
Des oiseaux voletaient par essaims
Au-dessus des îlots veillant la nichée
Gardaient dans un tumulte stridulant
La thébaïde et ses havres de paix
L'antre naturelle et solennelle
A l'abri de tous les prédateurs
Mais sur l’étendue venu de nulle part
Rasant le flot et la lame assuré
Merveilleusement voltigeur et acrobate
J’aperçus un pélerin racé l’épure
A dessein ou divinement tracée
D'un vol à l’orbe féerique des anges
Un instant juché et immobile
Comme s’il se fût posé sur un rocher
Le Puffin tourna la tête et me fixa
Il tenait bon le vent debout
Le duvet blanc et soyeux
L'éléguant et seyant plastron
Osaient la candeur de l’hirondelle des mers
Tandis que de ses ailes puissantes
Et précises il rivalisait avec l'albatros
Sans jamais battre de l'aile
Simulant les hautes latitudes
Affirmant une noble destinée
L’oiseau s’envolait comme il plongeait
Véloce et radical en tous ses jeux
Dans l’ivresse des bourrasques
Et les vagues de vent invisibles
Il se cachait au creux de la houle
Emergeait soudainement et masqué
Par la crête immaculée des lames
Le regard vif et empli de cautèle
Il s'esquivait
Venant du ciel comme il surgissait des flots
Il planait en accompagnant joyeux
A sa guise la rafale et la saute de vent
Inlassable et imprévisible vision de liberté
Qui jaillissait du large ou de l'azur
Le Puffin abolissait la distance et ses rivages
Pensées séraphiques Fresque empyrée
Que l’on eût cru possibles ou réelles
Illusion au seuil de l’éther vision
D’où nous vient l’essence des mots
Qui gravent l’instant
Et nous rend émerveillable
De ce jour ourdi des ciels
Mes bordées devirent songe
Concédé aux rives de l’âme
A la pleine mer que l’esseulement ravit
Je le confiai à la trame des sens
Qui embrassent la terre entière
Au cillement de nos prunelles
Epousant les confins résolus
Du cantique et de la poésie
Il paraît que les puffins
Raffolent des stances
Fluides de l'air et de l'eau
Ainsi louent-ils et content-ils le bon Dieu
Serait-ce peut-être de ce champ bleu
Que les sirènes et les oiseaux
Elèvent leur plain-chant immémorial
Lorsque l’homme un moment se devine
Entre matière et esprit
Oasis ou mirage
Animé du souffle éployé
A l'unisson des ailes majestueuses
Et insatiables de l'amour
§
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