MER GROSSE ...
C'est un Cliché avec Zoom très puissant : 60 x Numérique. Voici la limite de l'horizon que ces barres d'eau cachent. Une onde sans doute rattrape la suivante et dresse un colosse liquide, viride. Les vents balaient les labyrinthes inlassablement recomposés de la mer ; il fait froid sous le soleil bas de l'hiver ; et ainsi, de se sentir si petit, insignifiant ... Alors, cette échappée, une longue pensée que la bordée égrène vers le soleil des lames et des bourrasques, un hiver perdu dans l'océan des étoiles
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Nous sommes au coeur de tous les hivers. La Tramontane et le Mistral lointains soufflent très fort. La mer est grosse, le Fetch remonte jusqu'au Roussilon. Je vois passer et défiler des ondes au large, s'enfuyant vers le Sud de l'Île de Sardaigne. La ligne d'horizon se déforme aussi loin que le regard porte. Et la mer gonfle, s'assombrit, comme si les creux avaient un moment masqué les rayons rasants d'un soleil matinal. En élongeant la côte dentelée, les tombants du grand sud de l'Île de Corse, la houle et les hauts-fonds lèvent des murs qui dépassent les collines, accourent à la côte à grande vitesse et s'écroulent en tonnant ; ils chutent dans un silence de brume et ouaté que le vide absorbe ou étouffe. Puis, telles des explosions à retardement, parfaitement orchestré, le rivage fleurit de nuages d'embruns muets, se couvre de torrents éclatants de blancheur qui ruissellent longuement dans un bruissement, uniquement, juste suggéré.
Voici les noces de la mer et de la terre que seuls les ciels confondus dévoilent. Rançon inestimable et intemporelle de l' instant, des essentielles révélations de l'harmonie et de la complétude des éléments qui honorent la noble saison et son Île. On dit l'hiver éteint, en sommeil ! il n'en est rien car c'est alors que le renouveau et la pérennité se jouent et se décident à créer d'un commun accord, que l'on ressent au plus profond de l'être l'allant sibyllin de l'Univers accomplissant la ronde des astres et des marées.
Mais des partitions de la mer : ces étendues glauques et tumultueuses, inlassablement recomposées où chaque sillage, toute pensée se referme inexorablement, sans traces ! cet univers où rien ne résiste, sans état d'âme et enclin à tout emporter ? Certes, mais voyons là un territoire incontesté, un désert apparent où les vagues et les dunes dansant à l'infini recèlent et exaltent la renaissance, le cycle inébranlable de l'échange, de toute complexion, de l'inestimable dessein de l'eau et du souffle promis l'un à l'autre dans leurs bleuités ; un monde où la lumière parfait l'existence des choses, recouvre un sens abyssal puisqu'elle est génératrice de vie et de diversité et par là de sublimes adaptations à l'étant.
Alors, un moment, balloté sur les flots, sécoué par de puissantes bourrasques, je contemple ce théâtre mouvant et ondé qui s'offre à mes yeux. Tant de fascination et de mystère vont au gré d'une échappée me rapprocher de ces antres où il n'est d'autre alternative que la fuite : glisser, parer à l'engloutissement. Pentes immenses et chamarrées du béryl diapré de silice ! Tout n'est que échos, résonances freutrées des cathédrales de verre, immense vitrail qui eût reflété un éclair de ciel ! Là, labyrinthique, la scène un moment suspendue dans le vide, l'absence de terre, sans aucun autre sens que l'élan des vents insaisissables ... Gigantesque bênitier où seul le puffin se risque à remonter vers la crête fumante des lames sans être rabattu ; mais de jouer inlassablement à virevolter, à tournoyer dans les airs au gré de ses ailes, ravissant, exaltant celles des vents. Ainsi, d'apprendre à voler un court instant, avec lui !
Comme on aurait souhaité être de la virtuosité, de la sérénité de l'oiseau marin s'appropriant la tempête, accomplissant les rêves de grand large ! J'aime ce perpétuel dévalement, toujours inégal et incertain de l'instant, lorsque découverte et horizon riment avec migration, régénérescence ... Et ce désir obscur, quasi irrépressible de poursuivre plus avant, de s'octroyer un cap et de s'y tenir, quêtant ainsi une frange d'éternité, une rencontre, un bonheur : incompréhensiblement et sans plus de raison qui vaille et minimise ...
Vois, Marin ! là-bas, ces ondes, des inconnues, entends l'appel des vastités ! munis - toi d'un fin voilier et quitte la zone, trace ta route, rejoins-nous aux contrées des ineffables élans de liberté et de source ; l'idée de l'homme reprendra-t-elle sens et espoir ! Ainsi de la mer aux desseins revisités de la soif de connaissance, de la tolérance, du respect de la diversité et des territoires jalonnés de splendeurs et d'offrandes passées, où germent depuis si lontemps pourtant les épis de la Sagesse
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La veille, le ciel chargé des basses pressions qui vers le Nord draine son cortège de nuages, hérauts des frimas imminents ! La mer chaotique et déchirée de vents lourds et brutaux, heurtée et si courte en son immensité. En arrière plan, le cap " Marianon "et les hauts Plateaux sous-marins de Vintilegna où l'on fait de drôles de rencontres échevelées ! ... Une 3.7 M2 pour voile, un si petit esquif sous les pieds et monte l'océan pulvérisé de l'absence