" ULMETU "
Non !
Ce ne sont pas les côtes du grand Sud Marocain, ni les vagues qui viennent mourir aux pieds du Rif et de ses abrupts immémoriaux d'où les hommes intrépides pêchent et remontent de lourdes ombrines ...! Nous sommes bien à bord d'une île à part.
Une terre d'étraves sur l'azur immaculé des songes délivrant quelques tours de magie éminemment blanche et solennelle. Souveraineté d'un territoire dépositaire d'histoires, de récits de mer et de craintes pérennes avérées. Le maquis est dense, gorgé d'eau, qui plonge vers la Grande Bleue livrant ses derniers tombants depuis les monts énigmatiques du tournant.
L'hiver est bien là, en dépit des soubresauts d'un hypothétique printemps météorologique. L'air ensoleillé du petit matin feint la douceur fugace d'un avril mais le vent du Nord marque comme il impose ses froidures.
Les beaux jours tarderont à régner ; c'est ainsi, depuis que les signes du ciel du dernier été ne laissent plus de prédire, de servir d'autres oracles.
Quelles solitudes les vents déclinent au large, vers les écueils subsistant sans autre foi que de rappeler aux hommes le chant des phoques jadis massacrés, la longue plainte voilée des naufrages d'antan.
Assis au bord de la création et des origines, nous contemplons le ballet incessant de la houle lointaine. Un vent léger suffit à coiffer la chevelure des vagues qui s'emparent de toute une large baie. Un front immense et mouvant accourt, parcouru de lames entre lesquelles on se prend à rêver de glisse plus que sauvage, impertinente, impudente, dans l'exaltation irraisonnée des senteurs de la terre baignée d'iode et d'écume.
On entend, venu des brumes salées du lointain azur comme un roulement de tambours, un grondement sourd, ininterrompu. En ordre de marche, les rouleaux d'écume gagnent les plages, les rochers, les hautes dunes de posidonies que les tempêtes agencent et disposent pour repousser les forfaits, les blessures que des hommes infligent à ces lieux de noces tutélaires.
Où et comment regagner la pleine mer, la beauté ? Peut-on encore et toujours jouer entre et sur de tels murs d'eau ? Les bords menacent, exposent aux dangers et l'eau trouble de la marée de tempête cache bien des pièges qui engageraient toute mise à l'eau ou le retour de l'aventurier, du vieux soliste !
Il émane de ce spectacle grandiose de la mer réconciliée avec l'hiver de puissants philtres. Et nous voilà, obstinément acculés à la légitime déraison des sens, aux excès de l'absolu, à la dénégation vraie des habitudes et du marasme...
Comme un élan secret, un dernier rappel de la vérité au fiancé de toujours, les actes et les scènes de la tempête oscillent entre tragédie et plénitude. Qui m'importe l'issue quand de procéder et de naître de toute noble infinitude
!
MARIN - Au terme de la Folie -