Vents violents. Une mer démontée. Des trous d'eau au large, subreptices. Des ombres fantomales guettent. Il nous quitte, abandonne le fond des golfes agités pour côtoyer la pleine mer ; ces étendues qui filent sous le vent avec leurs rapides coursiers d'écume.
Dômes liquides, avalancheux et croisés qui témoignent de la mer d'une violente tempête, des prémices d'une puissante houle à venir. Les profondeurs et les fonds travaillent, modèlent inlassablement des masses d'eau colossales.
Et les puffins cendrés sont de sortie. Il tempête. Les violentes rafales ne couchent plus les lames mais les affolent, les déforment. Elles en deviennent parfois laides, si loin de l'épure cristalline et du galbe parfait !
Murs d'eau dressés, soulevés tels des nuages d'embruns, profonds sillons dont les deux versants déferlent tour à tour et circonscrivent le temps. Le passé antérieur, le futur immédiat caracolent et défient l'essence de l'instant, ce pan d'éternité. Fantastiques métronomes !
L'attention vire à la vigilance extrême. Georges nous confie renaître aux sens irraisonnés de la folie en tentant de capter tous les indices palpables, invisibles, encore irréels.
Ainsi du dialogue avec la mer, de la hantise des funestes rouleaux, de la précison empirique du cap à suivre dans un dédale d'ondes croisées, un cirque mouvant ...
En esprit, il tente de traiter l'information précieuse ; tout va si vite. Le marin reste humble, craint. Il lui importe de se situer et de se ménager un vaste espace de manoeuvres et de risques amoindris. N'être sûr de rien : engranger et observer, seul le verbe d'action importe.
Rien ne saurait être pareil, se reproduire à l'identique ; c'est la mer et son lot inépuisable de possibles, d'imprévus qui dicte et ne prévient pas !
Les nuages défilent. Suivant le cap, on passe d'un jour à l'autre ; de la pleine lumière, des transparences tourmalines des vagues au zénith du soleil, à la fin ou au point du jour, seules quelques secondes suffisent à bousuler le cours des heures.
Des flots virides à la mer grisée, " NEMO " va au gré d'un souffle stellaire. L'entendement ne suit plus ! La solitude abandonne ici ses pensers douloureux qui affectent l'âme et que l'abnégation convoque hélas ! en pareils lieux de mort latente, de probable mort subite.
Il est de ces dialogues étranges avec l'éther, hermétiques... Les éléments exaltés initient au fil de la voie, de l'extrême tension, vers quelques révélations.
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RÉCIT - GEORGES NEMO -
Pour
CORSICA...GO56