Les Ecueils, le Tournant, Grand Sud, Levante
CHAUSSEE / Écueil sous-marin dépassant de peu la surface des eaux. Exemple - Chaussée de Sein.
!
Avoir été une fois, depuis la côte, solitaire, à bord des vents, du lumineux Ponant et, virer le Tournant...! Qui accompagnerait ainsi le fort coup de temps, un puissant Levante, en suivant ces innombrables moutons ivres de grand large ?
Je revois celui qui croisa et doubla la Balise des Écueils tant redoutés, emporté par les rafales d'un Grand Frais de secteur Ouest.
Nous le vîmes s'atteler au près serré, décliner et conjuguer une à une ces bordées et qui remontait inlassablement le cours du Mistral matinal.
La mer agitée lui accorda alors et encore quelques trajectoires, autour des deux pôles majeurs des hauts-fonds juchés à quelques milles nautiques des rivages, des îlets cernés de profondeurs, à l'applomb de quelques fortunes de mer passées et légendaires... Il aura survolé les abrupts bleu-nuit, quelques épaves gisant par cent mètres de fond qui animèrent tant de chimères sur la route du Tournant ! ...
Contrées de toutes les plénitudes et si contrastées. Domaine invétéré des solitudes tonnantes ! On aurait tant souhaité rendre visite aux colonies de Phoques Moines qui jadis investissaient cet univers de blocs, de passes et de courants incessants. Courte mais redoutable chaussée...
Avec eux, tant d'oiseaux. Une manne pour la pêche et la subsistance. Un havre de paix où relâcher, le temps d'une escale vers d'autres thébaïdes marines. Sur la route au long cours des migrations millénaires et providentielles brille désormais une étoile dans la nuit, par toutes les nuits que le temps compose et dénoue, quoiqu'il advienne !
La balise automatisée prévient de mille dangers. Le faisceau trace dans l'obscurité abyssale la route et le secteur sécurisés qui mènent à bon port, en doublant de loin les récifs et les secs parsemés le long du vaste détroit.
Les vents orographiques s'y engouffrent, faussent compagnie pour un temps aux flux synoptiques. Le météorologue en perd ses arythmétiques cadrées, pléthoriques, ampoulées ! Le haut massif montagneux tout proche et les dessins du grand sud de l'île commandent sans faillir aux variables du temps, du gros temps nous dit " Barnabé " ...
Ainsi de la houle et des flux éthérés, véritables travailleurs de la mer qui façonnent et sculptent la pierre des tombants de la montagne dans l'azur. Là-bas, les rochers et les blocs ouvrent des gueules hallucinant le silence qui n'aurait d'yeux que pour " KALLISTÊ " !...
Une fenêtre veille sur les étendues ; atttendre qu'une silhouette, une présence se montre, ne serait-ce qu'un instant.
Tout seul, entre ces vestiges de terres fractales, sidéré par les rafales et le grondement des flots, Être et penser recouvrent le vrai sens des choses essentielles, du verbe d'action.
La côte semble si loin et les cimes immensément hautes s'élèvent au diapason des milles nautiques avalés par le petit esquif ...
Aventure, raid, solo, serait-ce assez pour poser les jalons, les repères de futures dérades insensées, les jours de forte mer ensoleillés ? Pourquoi pas ?
Il ne s'agit aucunement d'un défi, mais d'une rencontre avec le Temps, l'imprévu, quelques soupçons de vies égarées ou en partance vers de fondamentales évasions.
- MARIN - Pensées en Mer -
Chaque mille gagné est sitôt perdu ; tout dépend le sens de la déraison, de l'abandon ; un allégeance à l'Eau-Delà des monts
!
__________________________________________________________________________________________