PASSEREAU !
L'horizon sur la mer vire à l'orange, opaque et dense ; l'oiseau apparaît, solitaire, sans le chant ! Une halte, furtive, cauteleuse. Il sera le seul petit être que nous aurions vu, durant tout le jour ... Il y a encore quelques années, le maquis tremblait au plain-chant sublime de ces petits anges-serins. Nous traversions ensemble le vaste golfe, les charmes mélodieux de l'aventure ; il n'eût point fallu voyager pour s'enivrer de lointains
Terres que l'on disait sauvages, îles qui comptaient parmi les plus belles de la Grande Mer et dont les aèdes louaient les splendeurs, les métamorphoses, le vertige de fascinants mythes et légendes !
Quels pans, quels tombants de vous en ces jours de canicules et de vents torrides demeurent à l'abri de la forfaiture et des conquêtes artificielles ?
J'ai dans le coeur un pépiement éblouissant d'oiseaux qui emplissait les entours du printemps, ces choeurs fabuleux qui convolaient aux noces perpétuelles de la terre et de la mer.
Le rivage pour jardin d'Eden, les îlots et les écueils cernés d'écume et d'embrun pour nonchaloir ondé encensant la brise marine, la brume des songes matinale. Nous allions insouciants découvrir le temps des secrets, tant de fresques aux parfums essentiels, ces voilures végétales berçant les révélations de l'anse et du sablon dorés.
Une branche suffisait, portait si haut le chant du passereau, de l'essaim qui voletait sans fin, s'enivrant d'harmonies et de frissons.
Et quand la tortue marine, imperceptiblement, perçait tout près le vélum de l'azur et soufflait, tout l'or du monde n'aurait alors suffi à irradier l'univers de l'unique instant, les ocres moirés de cette dive apparition.
Rives que le silence et l'absence désormais enténèbrent, comme si le temps eût celé ces vérités hors du temps dont la modernité ne veut plus, qui les troque en les morcelant à l'infini, indéfiniment viles telles la ville et le béton
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- MARIN A TERRE -
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