LE MARIN !...

Pour un final, une dernière strophe magnifique, ce poème de la mer et de la destinée ! Le voici sur fond de tempête " Fabien ", vers le Grand Sud des Îles balayées par les vents marins, les vents lointains. Oui ! Beauté et Vertu, tracent un beau chemin, abandonnent à la Terre de fabuleuses empreintes !

Le Marin 

!

O flots d'événements ! d’où viennent nuits et pluies ?
Il faisait calme et clair quand j’étais prés du bord ...
Et quels vents aujourd'hui, quelle mer en furie !
L'on ne peut plus voguer,  ni revenir - alors,
Nous faudrait-il quitter le vaisseau de la vie ?

Heureux celui dont le navire, sur la mer
A les célestes soeurs Vertu, Beauté, pour guides !
Quand la nuit s'assombrit, gonfle le gouffre amer,
L'une de son nectar, lui fait l’âme impavide,
L'autre montre sa face et fait le chemin clair.

Celui qui Vertu pour elle même adore,
Abordant le haut roc de la gloire, est heureux
Et d'un baume romain  son élan revigore.
Même si Beauté vers lui n'a point tourné les yeux,
Dans le sang il l'aborde - et la sueur encore !

Pourtant, à qui Beauté va montrer sa splendeur
Et, traîtresse au milieu de la route s'envole,
Entraînant de l'Espoir le fantôme trompeur ?
Ah ! quel vide du monde à présent le désole,
Et le miel de Vertu ne lui rend sa vigueur.

Au lieu de voir Beauté s’élevant dans l'espace,
Gémir dans l'ombre, en proie à l'orage sans fin,
Au lieu d'un coeur aimant, heurter un coeur de glace,
Prendre une main de pierre en place de sa main
- Et mener malgré tout combat qui ne se lasse ?

Combat si dur - pourtant si facile à finir !
Pour moi plus de tourments ni de longue ignorance ...
Mais ,avec nous ,tout dans ces flots va t'il périr ?
Ou, lorsque qu'on naufrage au sein de l’être immense,
Ne peut on s’échapper, au fond ne s'engloutir ?

Ce qui vit doit mourir ! - me proclame le monde,
Mais mon intime foi sous ces mots ne froidit
Car l’âme ne peut être étoile moribonde :
Lancée, elle tournoie en l'abime,  infinie
Tant que poursuit le temps ses éternelles rondes

...

Adam  MICKIEWICZ 

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Comments

[JOSS]

Le combat est puissant dans cette écriture dense et rude , difficile de ne pas sombrer.

Beau texte .