JOHN KEATS / EXTRAITS ! ...
" Ici repose celui dont le nom était écrit dans l'eau "
( Here lies one whose name was writ in water ).
John KEATS
http://rhiannonbrequeville.over-blog.com/2014/02/john-keats.la-mort-d-un-po%C3%A8te.html
... Tous les charmes ne sont-ils pas rompus
Au simple contact de la froide philosophie ?
Il y avait un arc-en-ciel que nous vénérions autrefois ;
Nous connaissons sa trame, sa contexture ; elle est donnée
Platement dans le catalogue des choses communes.
Le philosophe rognera les ailes de l’ange,
Conquerra les mystères à l’aide de règles et de lignes.
Videra l’atmosphère hantée, la mine qu’habitent les gnomes ...
Hors d’ici ! histoire pompeuse ! hors ! fourberie dorée !
Sombre planète dans l’univers des faits !
Vaste mer qui élève un murmure sans fin
Sur les rivages caillouteux de la mémoire
O Solitude ! si je dois habiter chez toi,
Que ce ne soit pas parmi les entassements confus
De sombres masures ! Gravis avec moi le pic escarpé, -
Observatoire de la nature, - d'où le vallon
Avec ses pentes fleuries et le gazouillis cristallin de sa rivière,
Puisse sembler un empan ; que je passe tes veillées
Sous des voûtes de branches où le daim, par ses bonds rapides
Écarte l'abeille sauvage de la digitale à clochettes.
La poésie de la terre ne meurt jamais :
Quand tous les oiseaux abattus par la chaleur du soleil
Se cachent sous la fraîcheur des arbres, une voix courra
De haie en haie le long des prés nouvellement fauchés ;
C'est celle de la Sauterelle - qui conduit le concert
Dans la volupté de l'été ; inépuisables
Sont ses délices ; et lorsqu'elle est lassée de ses jeux
Elle se repose à l'aise, abritée sous quelques roseaux hospitaliers.
Saison des brumes et de savoureuse abondance,
Amie intime du soleil qui mûrit,
Conspirant avec lui à charger et bénir
De fruits les treilles qui courent le long des toits de chaume ;
A courber sous les pommes les arbres moussus des enclos
Et combler tous les fruits de maturité juqu’au coeur,
A faire enfler la courge et s’arrondir la coque des noisettes
D’une tendre amande ; à faire bourgeonner encore,
Et encore, des fleurs tardives pour les abeilles,
jusqu’à ce qu’elles croient que les tièdes journées ne finiront jamais
Tant l’été a gorgé leurs humides alvéoles.
Seul dans la Splendeur
D’éternels murmures elle entoure
Les rives désolées, et, de sa houle puissante,
Gorge deux fois dix mille cavernes ; jusqu’à l’heure où le charme
D’Hécate les laisse à leur vieux bruit ténébreux.
Souvent d’humeur si douce elle se trouve
Que c’est à peine si le moindre bout de nacre
Bouge des jours durant de là où il vint échouer
La dernière fois que du ciel les vents se sont déchaînés.
Ô vous dont les yeux sont irrités et las
Offrez-leur pour festin la mer immense à parcourir ;
Ô vous dont les oreilles sont assourdies d’un vacarme barbare
Ou nourries à l’excès d’une mélodie fade
Asseyez-vous au seuil béant d’une vieille caverne, et rêvez
Jusqu’au sursaut du réveil, comme si le chœur des nymphes de la mer chantait.
Je ne peux voir quelles fleurs sont à mes pieds,
Ni quel doux parfum flotte sur les rameaux,
Mais dans l'obscurité embaumée, je devine
Chaque senteur que ce mois printanier offre
À l'herbe, au fourré, aux fruits sauvages ;
À la blanche aubépine, à la pastorale églantine ;
Aux violettes vite fanées sous les feuilles ;
Et à la fille aînée de Mai,
La rose musquée qui annonce, ivre de rosée,
Le murmure des mouches des soirs d'été.
Traduit de l’Anglais par Alain Suied
Quoi de plus agréable que le vent de l'été,
de plus apaisant que la charmante abeille
qui reste un instant sur la fleur ouverte
et repart , joyeuse, bourdonner d'ombrage en ombrage ?
Quoi de plus tranquille que la rose musquée soufflant
son odeur sur une île couverte de verdure,
loin de toute connaissance humaine ?
Chargé de vigueur comme l'air des profondes vallées,
aussi dissimulé qu'un nids de rossignols,
aussi calme que les gestes de Cordélia,
traversé de visions à l'égal d'un vaste récit ?
Quoi d'autre, sinon le sommeil, si proche du regard !
Ce long chuchoteur de tendres berceuses,
agile rôdeur autour de nos oreillers ravis,
qui entoure d'une fraîche magie le coquelicot naissant et les saules pleureurs...
Sommeil qui en silence dénoue les plus belles chevelures,
et fait de lui le plus attentif des auditeurs...
c'est pourquoi
le matin vient bénir et faire briller ces chers regards
Au jeune lever du soleil.
( Traduction personnelle / Babelio )