UN PEU PLUS PRES DU CIEL ! ...
Il y a bien longtemps que je n'ai pas chaussé et élancé sur les flots l'une de mes planches courbes ! Elles auront traversé obstinément les époques, franchi un millénaire, changer de siècle.
La houle, le vent droit et vivifiant du large, mes Puffins Cendrés si familiers, ces années fraîches aux soirs lumineux que les brises marines délicieusement tardées berçaient ;
Ces moments que nous passions sur un lit d'algues odoriférant avec nos jeunes enfants, tout cela manque et s'éloigne cruellement. D'aucuns, se prétendant des liens de sang, auront tout tranché. J'ai largué les amarres, ne leur laisse qu'un sillage, un panache écumant !
La vie s'est écoulée ; tantôt crues, torrents impétueux, averses, violents orages, tantôt pluies légères, pemières neiges qui jamais ne reviendront. Ineffables printemps ! Gardons-en le souvenir des plus belles rives, au-delà du mirage, sans illusion aucune. Le prix du regret ne se négocie point ! La vérité inexorablement sourd et pointe avant de comparaître, juste avant le grand saut...
Je vois, de mois en mois, décliner l'enveloppe des apparences, tituber l'outil avec lequel je coudoie encore humblement les pans d'une nature vraie, les révélations de l'instant, autant d'échappées belles et vertigineuses, osées loin des lieux communs, si près des écueils, des hauts fonds, du Tournant, de la grande passe dont je tais le nom, seul, si souvent seul ... Mais exister, vibrer, frissonner aux pentes douces et feutrées de l'onde mélodieuse, sur le velum soyeux de l'azur !
Que je réfugie encore une fois, à bord de ce Journal intime, quelques clichés ! L'on y découvrira de jeunes formes de corps que la motivation et le sens de la mer accordent aux fidèles du Grand Bleu, aux adeptes d'une fabuleuse trouvaille vélivole, par - delà l'âge, les années.
Les images gardent indéfinimement une part habitée et tant vécue que l'être duel s'octroie partout, dans le souci de l'alliance et du pacte indéfectibles avec les éléments.
Aucun artifice, sans vitrine, loin de paraître, du titre, de l'audience, du chiffre, de la représentation, que j'approfondisse en ces claires pensées la voie des accords que le corps, le néocortex, poursuivent sans fin, jusqu'au dernier souffle. Et de tendre vers l'infini, le Point de Rencontre, un sigle Omega !
Une relation à l'azur que je souhaite mystique, abyssale. La vague philosophale me donne la mesure et le tempo d'une mystérieuse relation cosmique qui étreint et submerge !
Partages incessants que l'image induit. Les courts- métrages, les splendides rendus numériques rivalisant de réalisme et de beauté avec l' Etant, l'émotion, l'espace, la crainte, le milieu que l'on ne souhaiterait jamais voir souillé, dévasté par les flammes, colonisé par des monceaux de déchets dérivants et de matières plastiques.
Il fait si chaud. L'haleine de la Grande Mer exhale le flux d'un enfer irradiant à la semblance de la forge, torride. Les ciels brumeux, exsangues et sans vie se perdent et chutent avant l'horizon. Les montagnes rocheuses et les hauts pins chauffés à blanc vibrent dans les lointains, ondulent sous l'effet des touffeurs, menacent de s'embraser ab nihilo ...
Le Mistral, le Ponant, le Libecciu s'en sont allés et, dans ce redoutable contexte dégradé, évoquons une chance inouïe ! J'attends patiemment le retour de l'automne, du moins si la Cinquième Saison se veut magnanime et prévenante, pluvieuse !
Le temps passe. La Recherche éclaire ma route. Eloge de la Fuite, prélude à l'Eau-Delà, j'en décrypte continuellement les partitions ondées, les traverses, les gués, les mirages, les saines arcanes, toutes les opportunités d'un voyage mémoriel.
Que l'être fabuleux qui me loge et qui me sert encore de lien, de médiateur, d'interprête, dure et perdure sans faillir jusqu'aux vires sursitaires de l' immarscessible jeunesse, par - delà l'usure, le handicap, la douleur, la limite graduelle forçant si souvent la retenue et l'appréhension.
Je me rendrai un jour à la fulgurance du départ, au terme de la Traversée. L'heure viendra de ranger mes planches courbes, leurs ailes multicolores, de fuir les coups de temps. Les yeux diluviés, la larme bleue, le regard Océan tourné vers les côtes du Gabon, je tituberai en foulant la grève, emporté par d'inextinguibles vertiges, un Blues ancestral pour dernier rappel. L'élan, la gravité romperont à l'envolée spirituelle, à l'âme enfin affranchie de tous ses maux.
Comprenne qui voudra et pourra entre injonctions et révélations que Mer - Océan réfugient, bercent et pansent la mémoire des mondes
!
- MARIN -
Confessions - Le Bout de la Route
1 ère Ecriture le 20 Juillet 2022