ESPACES REMARQUABLES DUNAIRES ET LACUSTRES
Comme un ballet lancinant et duel, la mer et la terre s'offrent en partage les rêves du monde. Elles les apprêtent, inlassablement. Le sable reflue avec les vents vers les monts s'en retournant à la source des pierres et cette fluxion baignée de lumières est immuable, pérenne, inaltérable en son essence sacrée
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Laissons un instant les clichés, les lieux communs, la carte postale aisée et ses filtres - philtres - attractifs ...! Ici, sur ces images et entre les mots, se tait le regard dépouillé de l'homme, se tenant devant ses origines. L' être nu et perméable à la beauté récuse ces balafres qui lacèrent les coteaux et les tombants vers la mer. Ils draineront bientôt un flot ininterrompu de voitures. L'oeuvre solennelle de la nature livrée en pâture aux masses motorisées, comme si la marche eût tuée son homme, ne se brade pas...
Et pourtant, on aperçoit au fil des lieues ces anciens relais de diligence qui jalonnent et ponctuent les voyages d'antan, dans la quiétude alentie du trot, comme un éternel pèlerinage aux sources .
Vers le Nord-Est, le Massif noble et altier, a Sarra di Cagna, entame son étrange et chaotique périple d'altitude et de blocs cyclopéens montés à l'assaut des cieux. Contremont, ont essaimé des pins splendides et l'espèce aurait muté face aux vents et sous l'influence de l'air marin ...!
Entre les premiers versants, un monolithe gigantesque se détache de l'azur et semble flotter dans les airs. Une sentinelle garde le bastion des roches célestes, un bestiaire minéral insolite et infini, dans le figement et le mutisme de la mémoire sauvage des mondes...Tout en bas, au bord des flots, les galets content la transhumance inéluctable de la pierre commuée en sable, puis en dunes. Un écoulement du temps et de la matière au coeur d'un espace virginal et beau. Un poudroiement d'or promis à la mer pour effranger les rivages de ces festons soyeux et tendres qui étincellent aux rayons du soleil.
La dune est née, elle a mûri et s'est épaissie ; les vents et les tempêtes l'ont étirée et étendue, loin vers les adrets. Parcourue de la sève limoneuse des montagnes, elle se régénère, blanche et immaculée à l'orée des beaux jours. Il n'est pas une parcelle de ce site qui n'évoque le vent dominant, l'eau, le commencement du monde. Les arbres, les genévriers se sont couchés et ont plié, cédé aux rafales, le sable et les algues esquissent des empreintes fuyantes, dérobées en remontant vers les collines ; quant à l'éloquence rebelle des rivages, nuancée et mouvante comme les vagues qui déferlent et renaissent, elle déclame la majesté de ces lieux uniques qu'aucun artifice éphémère ne saurait côtoyer sans jurer et tristement blasphémer .
Les rochers et les pierres ont revêtu une peau mordorée, ocre, incarnat tandis que le sable fin demeure éclatant de blancheur, si fin, un manteau crissant où les pas s'enfoncent profondément. Au coeur de la dune, l'eau et les rus qui courent vers la mer rassemblent de beaux tamaris en fleurs. De splendides résineux à larges baies odoriférantes rampent sur les dunes en éployant une ombre fraîche et généreuse. La brise s'y engouffre et porte loin le chant des vagues qui bruissent à l'unisson des ramures ombreuses.
La terre, tel un rempart s'arrête brutalement et comme une digue d'algues couronnant la plage en demie-lune, elle s'est couverte d'oyats, d'une épaisse chevelure, épis très longs qui ondulent en s'enfuyant avec les vents. La terre et le sable contenus respectent ainsi leurs horizons dans la plus harmonieuse des complétudes. Je ne saurais vous décrire, peindre ou oser ce tableau inondé d'azur et de turquoise tant il m'apparaît irréel...! Voici Avril ou Mai, ces mois qui sur l'Île de Corse et en de nombreux archipels, donnent à la côte ces élans de voyage avec le Levante qui se déchaîne, après le tournant de l'extrême-sud que chacune d'elle arbore.
Dans quelques jours, la dune immense et encore gorgée d'eau se couvrira de cistes blancs, de cistes de Crête puis du " Muchju biancu " ou marinu ( Cistacées ), cette plante très rameuse à fleurs jaunes qui envahit les couverts sableux des dunes littorales. Et la mer et la terre s'illumineront de mille soleils, comme la nuit et ses étoiles qui dansent sur les flots.
Le printemps s'en ira au fil des vents de terre, emportant avec lui en tourbillons d'embruns, loin en mer l'effluve sapide d'une île en beautés et que le béton saccage et envahit un peu plus chaque jours aux profits d'une multitude de nouvelles richesses désopilantes.
Alors, j'irai avec l'Autan béer au printemps, l'âme inondée de bleu, quêter l'aure d'une vallée soufflant des racines, de l'ubac ancestral perdu. Là-bas, une île renaît au pas mesuré de l'errance, du souvenir, de l'amour de la Terre que tous les vents caressent. On voit le même jour le soleil se lever et se coucher sur la mer, comme au large, comme si une île m'eût bercé d'illusions, d'au-delà
MARIN
La dune, comme une lettre de l'alphabet Tifinagh, essaime les pensées des grands et nobles espaces